Comment votre parcours a-t-il commencé ?
Sur un coup de foudre pour le monde du vin et ses Hommes, lors de mon arrivée à Napa pour un stage chez Clos du Val alors que j’avais 19 ans. Je n’avais aucun lien avec le vin. On n’en buvait quasiment pas à la maison. C’est un pur hasard. En revanche, j’ai été élevée dans une ferme et la terre « me parle ».
Quelle est la partie la plus gratifiante de votre métier ?
Les satisfactions sont nombreuses
Produire du vin, c’est participer de la culture et de la tradition françaises et s’inscrire dans le temps. C’est créer un « produit » sensuel qui est une occasion de rencontre, de partage et de plaisir.
C’est rendre une équipe fière de son travail en lui donner du sens.
C’est cultiver des gestes d’artisanat tout en les faisant évoluer.
C’est de mieux en mieux connaître son vignoble et le faire progresser en s’adaptant à de nouvelles conditions climatiques, environnementales et sociales.
C’est jouer avec les technologies (dans tous les domaines de l’entreprise : IA, numérisation, automatisation …) pour faciliter le travail et le rendre plus efficace et moins pénible, avec les nouveaux modes de communication (Réseaux Sociaux, IA…) tout en gardant les pieds dans la terre : c’est conjuguer le temps long de la vigne et celui ultra court de la communication.
Pouvez-vous décrire la philosophie du domaine et comment elle influence les vins que vous produisez ?
Nous pratiquons une viticulture de bon sens, de réalité. Notre terroir a la capacité de produire des raisins de grande qualité en quantité raisonnable (40hl , 45hl). Nous avons pris pleine conscience de la richesse de notre environnement et de sa fragilité. Au quotidien, nous inventons notre chemin en combinant respect de pratiques traditionnelles (soutirage à l’esquive), la transmission du savoir-faire par la formation des jeunes, l’innovation (utilisation des levures naturellement présentes sur le raisin, à la parcelle et par millésime) pour mieux exprimer notre terroir et notre identité… nos vins sont honnêtes, précis, sans exubérance, équilibrés et complexes. Ils sont rassurants, inspirants et invitants. Nous nous voulons classiques au plus beau sens du terme, classiques contemporains . Je vous encourage à venir à St Estèphe pour découvrir l’esprit Phélan Ségur. Nous sommes une équipe de passionnés et sommes très investis dans notre mission. Nous faisons partager notre métier sans le galvauder ou trop le vulgariser. Nous partageons nos vins autour d’un repas préparé par notre chef à demeure. En bref, l’accueil est une marque de fabrique de notre propriété.
Quel est, selon vous, l’aspect le plus difficile dans l’élaboration d’un vin ?
Il s’agit d’un principe de réalité : celui de concilier l’équilibre économique d’une propriété et son idéal stylistique quel que soit le millésime.
Avez-vous un cépage préféré avec lequel travailler ? Qu’est-ce qui le rend spécial pour vous?
Il est difficile de choisir. Le Cabernet Sauvignon est celui qui apporte le plus de noblesse, de race et de profondeur. Mais il est à magner avec doigté pour dompter ses tanins. C’est aussi celui que l’élevage transcende le mieux.
Pouvez-vous partager un millésime mémorable ou un vin dont vous êtes particulièrement fier ?
2020 car c’est le premier de Phélan Ségur qui comporte les 4 cépages Cabernet Sauvignon, Merlot, Cabernet Franc et enfin Petit Verdot planté en 2013. C’est également le premier millésime où nous avons remplacé les levures commerciales par les levures naturellement présentes sur nos raisins et cela par parcelle. Il ne s’agit pas de fermentations spontanées ni de pied de cuve mais bien de crèmes de levure cultivées « à la parcelle » et inoculées dans les cuves correspondantes. Cette opération est donc renouvelée à chaque millésime pour encore mieux exprimer la diversité de notre terroir. Les vins ont gagné en pureté, précision, finesse, relief. C’est une façon pour nous de limiter les intrants et de mieux exprimer notre vignoble millésime après millésime, d’éviter l’uniformisation.
Qu’est-ce qui rend votre région et votre vignoble uniques par rapport aux autres ?
Le Médoc et surtout le Nord de cette presqu’île se méritent. Il faut cheminer pour y arriver. Certes, le long de magnifiques propriétés sur la fameuse D2 aussi appelée Route des Châteaux.
St Estèphe ne peut pas se considérer sans la Gironde qui à ce niveau s’élargit et dont les marées rythment nos journées tout en ayant un rôle de modération thermique. Le paysage devient plus vallonné. L’océan est proche, la forêt et les marais plus présents. L’argile vient se mêler aux graves profondes. On y cultive d’immenses Cabernet Sauvignon et des Merlot sérieux.
Notre vignoble est constitué de 4 grands blocs parcellaires ajoutant une diversité supplémentaire.
Si vous pouviez faire du vin n’importe où dans le monde, en dehors de votre région actuelle, où serait-ce et pourquoi ?
La Champagne et le Champagne me fascinent. C’est un vin magique et d’une grande complexité.
